Charlène, dans les parcelles de café du volcan Pacaya
Charlène, dans les parcelles de café du volcan Pacaya

Voyager dans les plantations de café du Guatemala

Passionnée, Charlène Cabioch connaît bien les compétitions de café de spécialité, dans lesquelles elle trouve un moyen de se former et d’apprendre toujours plus. Première femme sur le podium du concours Coffee in Good Spirit en 2019, elle participe aussi au championnat d’Aeropress la même année et arrive en demie-finale. Mais ce qu’elle aime le plus, c’est voyager.

Alors qu’elle se prépare pour la prochaine Brewer’s Cup, Charlène nous parle de ses voyages au Guatemala et de la relation si particulière qu’elle entretient avec les cafés de ce pays.

Qu’est-ce qui t’as attiré vers le café de spécialité ?

Ce que j’aime le plus dans le café de spécialité, c’est sa qualité et la traçabilité. Savoir d’où il vient, quelle est sa variété, comment il a été cultivé. C’est une qualité qui garantit aussi à son producteur un meilleur salaire. Le café de spécialité, c’est pour moi des découvertes. Ce sont des cafés différents, des process, de nouvelles saveurs. Et il y a pleins de méthodes de préparation. Les méthodes douces, comme la chemex, l’aeropress ou autres, pour développer au maximum toutes les qualités d’un café, son goût et ses arômes. En ce moment, ma méthode préférée est la V60, j’en fait énormément pour la préparation de la Brewer’s Cup et j’adore la tasse qu’elle procure. Très nette, délicate et florale. La Chemex est ma première découverte en ce qui concerne les méthodes douces j’aime beaucoup l’utiliser aussi..… C’est trop difficile de choisir ! 

Quand tu choisis un café, est-ce qu’il y a une région vers laquelle tu te tourne plus facilement ? 

Depuis que je suis partie au Guatemala, c’est l’une de mes origines favorites. La région de Huehuetenango est sublime, tout comme Antigua, ou celle du lac Atitlan, des volcans Pacaya ou Acatenango. J’aime également les cafés d’Afrique, d’Éthiopie par exemple comme le Yrgacheffe. Mais mon coup de cœur pour le Guatemala a commencé il y a un an et demi, quand nous y sommes parties pour la première fois avec mon amie Carla. J’ai eu la chance de visiter une plantation à Antigua, qui s’appelle La Azotea. C’était assez touristique mais très charmant. Une première découverte dans les plantations de cafés, la première fois que je goûtais une cerise de caféier. C’était simple mais un moment génial.

Dans les plantations de Pacaya, au Guatemala
Dans les plantations de Pacaya, au Guatemala

En arrivant au Guatemala, tu avais déjà des contacts dans le café ?

Pas la première fois, non. Mais après notre premier voyage, Carla est revenue vivre au Guatemala et a rencontré des producteurs par chance, lors de l’ascension du volcan Pacaya, à côté d’Antigua. En discutant avec la guide qui l’accompagnait, elle découvre que celle-ci est la femme d’un producteur, et lui propose de rencontrer son mari et de visiter la plantation. Alors je suis revenue au Guatemala en novembre 2019 pour ne pas louper cette chance.

Comment s’est passée cette deuxième expérience ? 

C’était beaucoup plus brut. La plantation des producteurs qu’a rencontré Carla, Joel et Paco, se trouve déjà bien plus loin d’Antigua et la route est longue avant d’y arriver. Elle se trouve à 1500 mètres d’altitude et tu ne peux y aller qu’en pick-up mais une fois arrivée aux premières parcelles, c’est magnifique. Un paysage vert, des caféiers partout, des grands arbres et les volcans en face de nous ! Dans ces parcelles, il y a aussi de grands arbres à Jocotes, des fruits de là-bas, avocatiers ou piments dont j’ai pu faire l’expérience, et ça rigole pas ! 

Qu’est-ce que vous avez pu voir avec Joel et Paco ?

Nous avons fait la route des cafés, qui part de la base du volcan Pacaya, et nous emmène jusqu’aux plantations de Joël.  Quand nous y sommes allées, c’était la fin de la saison des pluies et le début des premières cerises de café mûres. C’est un super souvenir. Grâce à lui, on a pu voir des hectares de caféiers, sous ombrage pour la plupart, et beaucoup de variétés différentes : des Bourbons, Catuai, Catimor mais aussi des variétés dont je n’avais jamais entendu parler avant, comme le Tekisic qui est une branche du Bourbon, ou le Pache. C’était magique !

Qu’est-ce que ces visites ont changé dans ton rapport au café ? 

Ce qui est merveilleux après un voyage en pays producteur, c’est de pouvoir mettre un visage et une histoire sur un café, encore mieux si c’est celui que tu es en train de préparer. Préparer un café du Guatemala me renvoie toujours à ces voyages. Aujourd’hui, c’est sûr que j’ai des coeurs dans les yeux dès que je peux goûter un café du Guatemala. 

Être allée en pays producteur me donne surtout envie de mieux respecter le produit, de faire le maximum pour le révéler. Visiter un pays producteur, c’est aussi se rendre compte que des gens se sont donnés du mal, et tout ça pour très peu d’argent au final… Tous les producteurs que nous avons rencontré nous ont dit qu’ils ne gagnaient pas toujours assez d’argent, et j’ai souvent cette réalité en tête. C’est pour ça qu’il est important de respecter leur travail avant tout.

Est-ce qu’on peut parler de révélation, quand on arrive pour la première fois dans un pays producteur ?

Oui, partir pour un nouveau pays c’est souvent un choc culturel. Remise en question et découvertes. La première fois que je suis allée au Guatemala, je me suis demandée ce que j’allais faire plus tard. Si le café me passionnait vraiment, si je voulais en faire mon avenir. Et c’est là-bas que je me suis dit que c’était fait pour moi. Il faut savoir que les guatémaltèques ont une relation vraiment particulière avec le café. Ils en boivent toute la journée, à n’importe quelle heure et à tous les âges. Difficile d’y échapper. Même un bébé a droit à un peu de café dans son biberon. 

Quand j’y suis retournée en novembre, que j’étais dans ces plantations, à me voir si petite à côté de tous ces volcans, au milieu de ces plantations… travailler dans le café est devenu une évidence.

Si je souhaite me rendre au Guatemala et visiter des plantations, lesquelles me conseilles-tu ?

Comme pour tous les pays producteurs, on trouve beaucoup de terroirs différents, avec des cafés vraiment typiques. Pour commencer, tu pourrais aller du côté d’Antigua pour goûter un café plein de douceur, avec de belles notes florales. On va retrouver beaucoup de cafés en process lavé. Ensuite pour des cafés plus fruités, plus acides, et sucrés je te conseille d’aller vers Huehuetenango, souvent des process naturels. Le lac Atitlan est aussi un superbe endroit. Et si tu as de la chance, pourquoi pas aller au volcan Pacaya goûter le café de Joël et Paco !

Et en dehors du café, pourquoi aller au Guatemala ?

Pour le climat, le paysage, la culture, l’architecture, les gens ! Tout le monde est souriant et chaleureux, j’ai passé des supers moments là-bas. L’ascension des volcans, la route des cafés, le surf… il fait bon vivre au Guatemala ! Aussi et c’est peut-être personnel, mais c’est important de voyager pour élargir son champ d’esprit, de sortir de sa zone de confort… c’est même important pour son rapport au café. Par exemple au Guatemala, ils boivent souvent leur café accompagné de sucre roux ou avec du lait entier. Quand j’étais là-bas, il m’arrivait de boire mon café comme ils ont l’habitude de le préparer. Alors oui, quelques fois c’est possible d’y ajouter du sucre et du lait !

Le café que tu souhaites présenter pour la Brewer’s Cup… ce sera un café du Guatemala ?

Yes ! J’ai vraiment envie de mettre en avant le café du Guatemala, et pour ça je travaille avec Franck, qui est torréfacteur de cafés de spécialités à Antibes, à la Torref de Fersen. Il a accepté que l’on travaille ensemble sur un café du Guatemala, pour trouver le meilleur profil. Je voudrais le remercier, et aussi remercier Jean-François Torre de Cafés Indien, qui m’a aussi aidé et montré mes premières broches et avec qui j’ai pu échanger pour la Brewer’s Cup. Je souhaite aussi remercier Carla grâce à qui j’ai pu découvrir le Guatemala et Joel et Paco qui nous ont accueilli dans leurs parcelles pour nous faire découvrir leur univers.

Le café que je vais présenter a été choisi parmi 2 process d’une même variété. C’est un plaisir d’écouter Franck me transmettre son savoir et d’apprendre sur la torréfaction, tout ce qui influe sur le goût du café, comprendre les différentes étapes. Et puis de goûter ces 2 cafés ! Les profils sont tellement différents, que ce soit sur les notes, le corps, la sucrosité ou l’acidité… tout en gardant le caractère propre aux cafés du Guatemala. Ils n’ont rien à s’envier mais mon préféré reste secret pour le jour J !